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lundi 17 octobre 2011

La naissance des ailerons : 1948-1953



Cadillac Série 62 Club Coupé, 1948
C’est en février 1948 que la GM présente sa première nouvelle carrosserie d‘après guerre, qui est partagée entre Oldsmobile et Cadillac. Cette nouvelle carrosserie adopte un style "semi-ponton" : les ailes avant intègrent le plan du côté mais les ailes arrières restent renflées. Chez Cadillac, le dessin se singularise par un détail qui va profondément marquer le style automobile américain des années 1950 ; des « ailerons » en bout des ailes arrières. Selon la légende, ces ailerons auraient été inspirés par la double dérive du chasseur Lockheed P-38 "Lightning" que l’équipe de style de la GM, dirigée par Harley J. Earl, aurait eu le privilège de voir avant sa mise en service (la GM fournissant les moteurs Allison de l’appareil). Selon Bill Mitchell, ces ailerons n’auraient été que le développement logique du dessin des feux arrières rapportés sur les ailes des modèles de 1941. En réalité, ces ailerons sont dus à Franklin Quick Hershey (1907-1997), le responsable du style de Cadillac depuis 1944 et le dessinateur entre autres de la Peerless V16 de 1932, des Pontiacde 1933 et de l’Opel Kapitän de 1938 (et qui sera ensuite responsable du style de la Ford Thunderbird de 1955). Harley Earl n’est en rien dans le dessin de ces ailerons, qu‘il désapprouve. Quand Hershey lui présente les maquettes des modèles en 1944, il lui demande expressément de supprimer ces ailerons en lui disant : "Ce n’est tout simplement pas Cadillac" ! Mais le dessin plaît à Nicholas Dreystadt et aux responsables commerciaux de la marque. Earl se fait une raison, et les ailerons vont devenir la marque distinctive des Cadillac.
La nouvelle carrosserie se distingue également par sa calandre dont la partie centrale est plus haute que ses côtés. La gamme se compose de la Série 61 (berline et coupé), de la Série 62 (berline, coupé et cabriolet), de la Série 60 Special Fleetwood (berline) et de la Série 75 Fleetwood qui conserve la carrosserie précédente, sa production étant trop limitée pour justifier le renouvellement des matrices de sa carrosserie. Les Séries 61 et 62 sont établies sur un empattement de 3,20 m, la Série 60 Special sur un empattement allongé de 3,38 m, et la Série 75 sur l‘empattement long de 3,45 m. La carrosserie coupé des Séries 61 et 62 est une magnifique carrosserie fastback à deux portes baptisée « Sedanet ». Beaucoup de stylistes affirment que ce type de carrosserie (utilisé par les autres division du groupe) est l’un des plus grands chef d’œuvre de tous les temps ; la célèbre Bentley Continental de 1952 porte d’ailleurs une carrosserie assez semblable. A l’intérieur, la planche de bord, en cuir grené, reçoit un tableau de bord semi-circulaire qui regroupe les instruments sous les yeux du conducteur. Le tableau retombe en pente douce pour s’arrêter juste au-dessus du plancher recouvert de moquette. Des conduites sont aménagées dans les portières avant pour amener de l’air chaud aux buses de dégivrage des vitres latérales. La version cabriolet reçoit des vitres électriques en série. Mécaniquement, le moteur est inchangé et il peut toujours être accouplé à la boîte automatique "Hydra-Matic" en option. Les prix s’échelonnent de 2 833 $ pour la Série 61 Sedan à 5 199 $ pour la Série 75 Imperial Sedan.
En raison de différents mouvements de grève dans l’industrie au printemps 1948, la production est en baisse et n’atteint que 52 706 exemplaires : 34 213 Série 62, 8 603 Série 61, 6 561 Série 60 Special, 1 262 Série 75 et 2 067 châssis commerciaux dérivés de la Série 75 (avec un empattement de 4,14 m).
La gamme est reconduite pour l’année modèle 1949 avec une calandre plus scintillante qui étend sur les côtés par l’ajout de moulures chromées et un coffre arrière plus vaste et donc plus bulbeux. Une nouvelle carrosserie fait son apparition : un coupé sans montant central ("hard-top" en anglais) dérivé du « Club Coupe » de la Série 62 et. baptisé « Coupé De Ville » (un terme ancien de la carrosserie française, utilisé dans les années 1920 et choisi pour sa sonorité en américain). L’origine de cette carrosserie se trouve dans le comportement de l’épouse d’un dessinateur du bureau de style de la GM qui possède un cabriolet mais qui roule constamment avec la capote relevée et les vitres baissées. Voyant que la capote ne sert jamais, le dessinateur propose de la rendre définitivement fixe en reprenant le dessin du coupé dont il enlève le montant central entre la vitre de portière et la vitre de custode. Le dessin est adopté pour les trois marques de gamme supérieure de la GM : Oldsmobile, Buick et Cadillac - il est baptisé Holiday chez Oldsmobile et Riviera chez Buick.
Mais la grande nouveauté de l’année se situe sous le capot, avec l’arrivée de la 4° génération de V8 Cadillac ; le V8 « haute compression », fruit d’un développement conduit depuis 1936 par John « Jack » F. Gordon (l’ingénieur en chef de la division qui a succèdé à Ernest Seaholm en 1943 et qui est devenu le directeur général de la division en 1946), Harry F. Bars (futur vice président de la GM), et Edward N. Cole (qui remplace Gordon au poste d’ingénieur en chef et qui deviendra le président de la GM). Leur idée est de profiter de nouveaux carburants à haut indice d’octane et d’augmenter le taux de compression du moteur à 7,5:1 (avec une possibilité d‘atteindre 12:1). « Il est certain qu’aucun autre moteur n’a jamais été autant essayé » expliquent les ingénieurs : « Dans sa forme finale, le moteur a parcouru plus d’un million de miles avant que la première Cadillac de 1949 ne soit présentée au public. Entre 1946 et 1948, plus de 25 moteurs ont été construits pour être soumis aux essais les plus intensifs ... Un moteur expérimental et un moteur de série de 1949 ont tourné pendant plus de 100 heures avec l’accélérateur ouvert au maximum ... il ne s'est produit aucune usure particulière ». Dessiné avec des soupapes en tête et une architecture hyper-carrée, soit un alésage (96,8 mm) plus long que la course (92 mm), il dispose d’une cylindrée de 5 425 cm3 (331 c.i.) et développe 160 ch à 3 800 tr/min. Le vilebrequin repose sur cinq paliers. Bien qu’en fonte, le moteur pèse 90 kg de moins que l’ancien V8. Il permet à toutes les Cadillac de dépasser le 160 km/h (100 mph).
Au niveau de l’équipement de série on note l’apparition des feux arrière de recul. Les prix restent stables ; ils s’échelonnent de 2 788 $ pour la Série 61 Club Coupé à 5 170 $ pour la Série 75 Imperial Sedan.
Non perturbée par les grèves passées, la production est en hausse de plus de 75%, et établit un nouveau record avec 92 554 exemplaires : 55 643 Série 62, 22 148 Série 61, 11 400 Série 60 Special, 1 502 Série 75 et 1 861 châssis commerciaux.
Pour l‘année modèle 1950, les Cadillac adoptent un dessin de carrosserie plus élancé et plus lisse avec une prise d’air verticale chromée en avant de l’aile arrière, un pare-brise en une seule pièce, une lunette arrière agrandie qui reprend le dessin de celle du Coupé De Ville, et une nouvelle calandre. La ligne de caisse adopte un décrochement en arrière de la porte avant et le nez du capot se prolonge en avant des phares. Seule la Série 62 conserve son empattement de 3,20 m, les autres sont établies sur des empattements plus court que précédemment. La Série 61 reçoit ainsi un empattement réduit à 3,10 m qui la rend plus trapue que les autres Cadillac, notamment du fait de ses ailes arrière plus courtes. La Série 60 Special voit le sien réduit à 3,30 m ; sa carrosserie arbore huit ouies verticales spécifiques sur les ailes arrière. Enfin, la Série 75 est désormais établie sur un empattement de 3,73 m et elle reçoit une nouvelle carrosserie, version allongée à six glaces, toit surélevé et lunette réduite des autres Cadillac, mais le choix est limité aux deux versions à sept places, avec ou sans séparation intérieure. Quant au châssis commercial, il est maintenant établi sur un empattement de 3,99 m.
Bien qu’aucune d’entre elle ne soit une voiture de sport, les Cadillac d’alors ont des performances extraordinaires. Le coupé de la Série 61 de 1950, léger et équipé d’une boite mécanique à 3 rapports et d’un rapport de pont de 3,77, est la voiture américaine de tourisme la plus rapide du moment. « J’en ai possédé une, en plus d’une nouvelle Jaguar XK 120 », raconte Edward Gaylor, pilote de course et constructeur de la luxueuse mais éphémère Gaylord, « la Cadillac est la plus rapide jusqu’à 145 km/h ... sa seule rivale en accélération est le petit coupé Olds 88 de 135 ch, mais le moteur Cadillac est considérablement plus efficace, à la fois en performances et en consommation ». L’appellation « Fordillac » devient populaire ; la carrosserie des Ford se mariant bien au moteur Cadillac. Dans les compétitions internationales, Briggs Cunningham, encouragé par Ed Cole, l’ingénieur en chef de la division, engage un Coupé De Ville proche de la série et un prototype à moteur Cadillac au Mans en juin 1950. Elles finissent aux 10° et 11° places du classement général, le Coupé De Ville précédant le prototype !
Les prix diminuent légèrement ; ils s’échelonnent de 2 761 $ pour la Série 61 Club Coupé à 4 959 $ pour la Série 75 Imperial Sedan. La production augmente de plus de 12%, et établit un nouveau record avec 103 857 exemplaires : 59 818 Série 62, 26 772 Série 61, 13 755 Série 60 Special, 1 460 Série 75 et 2 052 châssis commerciaux. Dès le 25 novembre 1949, la millionième Cadillac tombe des chaînes : il s’agit d’un Coupe DeVille…
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